Faire revenir la faune sauvage dans des plantations de palmiers à huile productives ? Tel est l’ambitieux défi du projet TRAILS coordonné par le Cirad en Malaisie. Il réunit les autorités locales, une entreprise privée, une université et une ONG autour de stratégies innovantes en agroforesterie pour allier restauration de la biodiversité et développement socio-économique du territoire. Premiers résultats.
« On ne peut pas sauver les orangs-outans en rentrant en conflit avec l’industrie, mais on peut leur donner des chances de survivre dans l’anthropocène », assure Marc Ancrenaz directeur scientifique d’Hutan. Cette ONG participe au projet TRAILS (climaTe Resilient lAndscapes for wIldLife conservation), coordonné par le Cirad et qui vise à rendre la filière palmier à huile plus durable au cœur du bassin du fleuve Kinabatangan.
Dans cette partie malaisienne de Bornéo, les palmiers à huile ont conquis près de 90 % des paysages. Ces cultures font vivre plusieurs millions de personnes en Asie du Sud-Est, mais au prix d’un coût environnemental largement documenté : disparition de la forêt, effondrement de la faune sauvage, pollution des cours d’eau, sensibilité aux épisodes climatiques extrêmes…
L’agroforesterie offre des solutions prometteuses pour rendre la filière plus durable, tout en contribuant au développement socio-économique des communautés. C’est là tout l’enjeu du projet TRAILS qui réunit le Cirad, l’ONG Hutan, l’entreprise Melangking Oil Palm Plantation (MOPP) et l’Université Putra Malaysia. Le projet bénéficie du soutien financier du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, de l’Alliance pour la protection des forêts et de l’entreprise Ferrero.
Retour de la faune sauvage et productivité des palmiers à huile
« Notre approche, basée sur l’introduction d’arbres dans les plantations et la restauration des corridors forestiers, est holistique, expose Marc Ancrenaz, directeur scientifique d’Hutan. En démontrant qu’elle permet d’allier protection des espèces, résilience au changement climatique et augmentation de la productivité, on pourra convaincre de nombreux producteurs ». Dont acte. Les partenaires du projet ont, pendant deux ans, sélectionné des parcelles, identifié et planté 15 essences endémiques pionnières et mis en place des protocoles de recherche en conditions réelles. La collecte de données scientifiques permettra d’évaluer, au fil des ans, tant les dynamiques de recolonisation de la faune sauvage, que la performance des palmiers à huile plantés dans ces nouveaux systèmes agroforestiers. Elle permettra de quantifier les services environnementaux rendus ou encore les impacts socio-économiques de la transition agroécologique en cours.
Appui scientifique à des initiatives locales
Un travail itératif mené en première ligne par les partenaires locaux et accompagné par le Cirad. « On avance ensemble dans la connaissance de ces nouveaux systèmes agroforestiers, en se basant sur les expertises de chacun et en incluant les communautés riveraines », détaille Marcel Djama, anthropologue au Cirad et coordinateur du projet. Avant d’illustrer : « Pour identifier les essences forestières adaptées comme arbres de service, on s’est appuyé sur près de deux décennies d’activités de reforestation de l’ONG Hutan. Les communautés villageoises riveraines de la plantation ont participé aux activités de restauration des écosystèmes dégradés dans et hors de la plantation, telles que la gestion des pépinières ou la conduite des reboisements. »
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