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Side event GIZ : « Les expériences de prise en compte des droits humains dans les processus de gestion durable des forêts et aires protégées de l’espace COMIFAC »
Organisé en marge de la 8ième Réunion du Conseil Directeur du PFBC, le Side event sur « les expériences de prise en compte des droits humains dans les processus de gestion durable des forêts et aires protégées de l’espace COMIFAC » a été une occasion idoine pour les différents programmes, projets et Organisation non gouvernementales impliquées dans les activités de la conservation de la biodiversité et protection du patrimoine autochtone, notamment REPALEAC, GIZ-BGF, GIZ-COMIFAC et GIZ-COMIFAC-BSB-Yamoussa de partager les histoires à succès, les principaux défis ainsi que les chantiers auxquels ils sont confrontés.
Conscient que la conservation de la biodiversité dans l’espace COMIFAC n'aura de sens que si elle prend à cœur les préoccupations et les droits des populations indigènes et autochtones. Suivant une introduction par le REPALEAC, le side event a permis d’échanger des expériences vécues et engager une réflexion en lien avec les trois thématiques suivantes :
La prise en compte des droits humains dans les processus de la conservation en RDC ;
Le Consentement Libre Informé et Préalable (CLIP)
La prise en compte des droits humains et du CLIP dans le processus de relocalisation des communautés autochtones.
a. Les appuis du BGF à la Conservation de la biodiversité en RDC: Prise en compte des DH dans différents processus. Par Mignonne Kayoyo. CT Normes et Standards, Réseautage des AP
Dans le cadre de l’exercice de sa mission qui est de gérer l’ensemble du réseau des aires protégées de la RDC, l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) fait face à des problèmes sérieux liés à la croissance démographique, le braconnage ainsi que d’autres pressions d’origine anthropique. Par ailleurs, l’histoire de la création des aires protégées indique qu’elle l’était sans l’assentiment des communautés riveraines du fait des restrictions policières, de la délocalisation des villages et de l’expropriation des populations de leurs terres; jusqu’à ce jour certaines communautés revendiquent leurs droits sur ces terres ou alors des mesures de compensation adéquates comme c’est le cas au PNKB et PNL. La réinstallation des peuples autochtones lors de la création des parcs (PNKB, PNL, PNS, etc.), sans consultations dans la logique du CLIP ni compensation appropriée, a eu de graves répercussions sur les droits de ces communautés et constitue un facteur sous-jacent à de nombreux défis qui perdurent depuis lors.
De ce qui précède, le décor est propice aux conflits entre les communautés locales, les peuples autochtones et les éco gardes et de fait l’ICCN en tant qu’entité responsable de la gestion des aires protégées de la RDC. Ces conflits sont malheureusement quelquefois aussi des occasions d’enfreinte aux droits de l’homme décriée dans plusieurs aires protégées, parmi lesquels principalement le parc national de la Salonga/PNS et le parc national de Kahuzi Biega/PNKB qui fait partie des sites d’intervention du programme GIZ de gestion durable de la biodiversité et des forêts en RDC (BGF).
L’approche méthodologique appliquée par le BGF en matière de droit humains ciblait initialement de manière transversale les populations vulnérables (femmes, PA) à travers des actions de sensibilisation et d’appui à des initiatives communautaires ciblées. Suite à l’accentuation des conflits entre les communautés et l’ICCN dans certains parcs de la RDC, notamment au PNKB à partir de 2018, la composante Normes et Standards du BGF à réorienter son approche stratégique dans le but d’améliorer les relations entre les communautés locales, particulièrement les PA, et les gestionnaires des parcs dans ses zones d’intervention, particulièrement autour du PNKB. Cette approche s’est développée à travers des appuis ciblés à différents groupes d’acteurs, susceptibles de jouer un rôle direct ou indirect dans la pacification des relations entre l’ICCN et les communautés autochtones aussi bien dans les processus actuels que dans ceux à venir.
Les résultats accomplis sont structurés selon les principe du guide sur la prise en compte des droits humains dans la conservation développé par la GIZ.
Principes de participation des groupes marginalisés au processus décisionnel: Dialogue de Bukavu entre le PNKB et les populations autochtones: nouvelle dynamique de concertation entre ces groupes d’acteurs, Sensibilisations des groupes marginalisées, Structuration des communautés riveraines des ETD et signature des protocoles d’accords pour la gestion de la zone tampon sur la partie Balanga et Bangengele au PNL, Appui à la tenue des COCOSI au PNL et PNKB.
Principes de participation des PA (Droits de participation spécifiques des peuples autochtones) : Appui à l’identification, documentation en vue de la reconnaissance légale des APAC autour du PNL et du PNKB, Consultation des groupes de peuples autochtones.
Principes d’ accès à un niveau de vie décent (Garantie d’un niveau de vie décent pour la population locale et groupe marginalisé) : Processus d’adoption d’une loi sur la promotion et la protection des droits des peuples autochtones, Opérationnalisation de la stratégie nationale de conservation communautaire révisée de l’ICCN, Valorisation des APAC pour le bien être des communautés et Inventaire sur la typologie des terres des PA autour du PNKB, Evaluation des services écosystémiques du PNL: Produits Forestiers Non ligneux tirés de la zone tampon du Parc sont très importants pour l’alimentation, la médecine traditionnelle et comme source principale de revenu pour les milliers de personnes vivant dans cette zone
Principes de renforcement et protection de la société civile (RC et auto-organisation des PACL et OSC) : Formation des 35 para juristes et des para sociologues fonciers, Mise en place de la synergie des Organisations de la société civile accompagnant les peuples autochtones riverains du PNKB dans la mise en œuvre de la feuille de route du Dialogue
Principes de redevabilité (Promotion de la transparence et redevabilité) : Prise en compte des droits humains dans les outils de gestion: vade-mecum du conservateur et écogarde etc.
Secteur de la sécurité : Application des règles d’utilisation des ressources, Développement et la mise en œuvre d’outils stratégiques
Principes d’un examen minutieux des impacts de notre action: analyse des droits humains dans le cadre du système de gestion Sauvegardes et genre, Existence d’un Etat des lieux documenté de la prise en compte des droits des PA au PNKB et au PNL, Evaluation de la mise en œuvre des protocoles signés entre l’ICCN-PNKB et les peuples autochtones et communautés locales.
Comme défis, nous avons relevé, la restriction des droits d’accès et d’usages des communautés locales et autochtones en raison du statut de certaines AP, l’absence d’un mécanisme opérationnel de gestion des plaintes et conflits, ainsi que des outils de base, l’absence d’un système d’indemnisation/compensation lié aux restrictions causés par la création des aires protégées et aux conflits, l’accroissement des abus sur le terrain dû à l’application insuffisante de la réglementation et à la fragilité du contexte global, la non clarification de certaines questions les cadres légaux et réglementaires, et l’amélioration peu perceptible des conditions de vie des populations riveraines du parc.
b. Consentement Libre Informé et Préalable (CLIP). Par Julia Metsio Sienne, PhD. GIZ « Appui Régional à la COMIFAC ».
Un principe fondamental dans le droit international présente le CLIP (Consentement Libre Informé et Préalable ; en anglais FPIC – Free Prior Informed Consent) comme le fait pour les peuples autochtones et communautés locales (PACL) de donner leur avis pour tout projet de développement susceptible d’avoir des impacts sur leur mode de vie et leur bien-être. Cela nécessite qu’ils soient d’abord bien informés sur le projet prévu (en connaissance de cause) et libre (sans aucune intimidation ou coercition) dans les négociations relatives au projet. Le consentement doit être obtenu avant l’engagement de toute activité et jusqu’à la fin du processus, les PACL gardent leur droit de faire valoir leur avis. Afin donc d’avoir un consentement valable, il est indispensable de s’assurer que l’ensemble de la communauté donne son point de vue, par exemple à travers des représentants librement choisis par elle-même.
C’est à cet effet qu’une initiative pilote de la COMIFAC portant sur l’élaboration d’une démarche consensuelle en matière de CLIP dans les aires protégées de l’espace COMIFAC sur la base des expériences existantes à été mise en place dans le Tri national de la Sangha (TNS) et dans le Complexe BSB Yamoussa et du PN Lomami. Elle vise à contribuer à un meilleur respect des droits de l’Homme et à une meilleure participation des PACL dans la gestion durable des aires protégées. Sa mise en place va promouvoir en même temps l’appropriation par les PACL des projets de conservation de la biodiversité, qui vont d’ailleurs à leur tour profiter du savoir important que ces PACL ont accumulé pendant des générations.
Dans le processus de révision du plan d’aménagement du Parc National de Lobeke, qui fait partie du TNS, il est important d’identifier les domaines dans lesquels le CLIP doit être recherché. Une étude a été menée en concertation avec le REPALEAC (Réseau des Populations Autochtones et Locales pour la Gestion Durable des Ecosystèmes Forestiers d’Afrique Centrale) sur les besoins essentiels des PACL autour de Lobeke en octobre 2020. Il en est ressorti que l’accès aux ressources comme les Produits Forestiers Non Ligneux (PFNL), la chasse traditionnelle et les sites culturels constituent des aspects importants dont tout plan d’aménagement devrait tenir compte. Un deuxième point concerne le renforcement des capacités des PACL et des autres acteurs (Service de la Conservation, communes, secteur privé), qui devra être suivi d’une bonne vulgarisation des textes juridiques et réglementaires comme les différentes conventions, le plan d’aménagement du parc, etc.
c. Relocalisation des villages situés dans le Complexe transfrontalier BSB Yamoussa/ Parc National Séna Oura, Tchad : Les expériences de prise en compte des droits humains et du CLIP. Par Jean Jadot ONDOBO, GIZ/BSB Yamoussa.
Le Projet d’appui au Complexe Binational Sena-Oura – Bouba-Ndjida (BSB Yamoussa) fait partie du Programme Gestion Durable des Forêts dans le Bassin du Congo financé par la Coopération technique Allemande au développement (GIZ) en appui à la Commission des Forêts de l’Afrique Centrale (COMIFAC). Le complexe est constitué des parc nationaux Bouba Ndjidda (PNBN) au Cameroun et Sena Oura (PNSO) au Tchad ainsi que leurs zones périphériques.
En vue de garantir la conservation de la biodiversité du PNSO, une activité de relocalisation des villages installés dans le parc a été menée par une plateforme d’acteurs constituée entre autres par le projet BSB Yamoussa 2, les populations des Cantons de Dari et Kounadji, le Ministère tchadien de l’Eau l’Environnement et de la Pêche (MEEP), les organisations de la société civile.
Il s’est agi d’un processus de déplacement et de réinstallation des populations vivants dans le parc. Compte tenu de l’impact physique (perte des logements), économique (perte des moyens de subsistance ou des ressources permettant d’accéder aux moyens de subsistance) et culturel, le processus de relocalisation dans le PNSO a été soumis aux principes de respect de droits de l’homme et de prise en compte des spécificités et des aspirations des Peuples Autochtones et Communautés Locales, incluant notamment :
le principe de consultation et de participation communautaire durant toutes les étapes et phases du processus de relocalisation et de réinstallation des villages affectées ;
le principe de transparence exigeant la divulgation et la disponibilité de toutes les informations relatives au processus de relocalisation et de réinstallation des communautés ;
le principe d’identification et d’évaluation préalables des biens appartenant individuellement et/ou collectivement aux membres des communautés concernées ;
le principe d’indemnisation et de compensation préalables des biens des membres des communautés affectés pour toute perte des biens ;
le principe d’aménagement préalable du nouveau site de réinstallation avant le déplacement ;
le principe d’octroi d’un délai raisonnable aux personnes touchées avant le processus de délocalisation.
Un comité permanent et inclusif a été mise en place en vue d’évaluer de manière itérative les impacts sociaux économiques et culturels de la relocalisation sur les populations et d’en proposer les solutions.