Le Nord Cameroun est une région particulière sur le plan agropastoral du fait d’au moins deux raisons. Tout d’abord parce que l’agriculture et l’élevage, qui sont les principales activités économiques de la région, se partagent les mêmes espaces avec les aires protégées. Le fait que près de la moitié du territoire est occupée par trois parcs nationaux et 28 zones d’intérêt cynégétique (ZIC) ou zone de chasse, représente une difficulté, car ça réduit considérablement les espaces dédiés à l’agriculture et à l’élevage, et met une pression accrue sur les ressources naturelles.
Ensuite, avec un peu plus de deux millions d’habitants, représentant environ 10% de la population totale du pays, la région du Nord est à la fois très peuplée, pauvre et rural et connait un fort taux de croissance démographique (4%) supérieur à la moyenne nationale (2.2%).
Dans ce contexte, le défi majeur du secteur agropastoral est d’assurer une production résiliente et durable, tout en préservant les ressources naturelles vitales à l’équilibre de l’écosystème. Ceci nécessite des approches et méthodes de vulgarisation innovantes afin de faciliter l’apprentissage de nouvelles pratiques et techniques par les producteurs et éleveurs. Ces approches auront comme objectif principal d’encourager la cocréation, l’expérimentation et l’adaptation des nouvelles techniques aux conditions locales et aux besoins et capacités des producteurs.
Au regard de ces défis majeurs, le projet Renforcement des systèmes d’innovation agrosylvopastorale dans le nord du Cameroun (ReSI-NoC) financé par l’Union Européenne, et mis en œuvre par un consortium composé de centres de recherche travaillant dans le domaine sur des thèmes pertinents (ICRAF, IRAD, Cirad, CIFOR), a mis sur pied des Centres de ressources ruraux (CRR), pour expérimenter de nouvelles techniques agrosylvopastorales pour une gestion harmonieuse et inclusive des territoires au Nord Cameroun.
Les centres de ressource ruraux : qu’est-ce que c’est ?
« Les Centres de Ressources Ruraux sont des lieux de formation et de démonstration, gérés par des organisations de base », définit Ann Degrande, gestionnaire du projet ReSI-NoC.
A ce jour, quatre (04) Centres de Ressources Ruraux ont été créés autour des parcs, notamment dans les localités de Bawan et Sassa-Mbersi pour ce qui est du parc de la Bénoué, Mayo Ndjarendi pour le parc de Bouba Ndjida, et Tchamba pour le parc du Faro. Selon Ann Degrande, la proximité des CRR aux aires protégées s’inscrit dans la logique où ils faciliteraient la négociation des compromis entre populations et services de conservation. Les populations reçoivent des appuis techniques et matériels permettant d’augmenter durablement la productivité agropastorale et ainsi leurs conditions de vie, pourvu qu’elles limitent la progression de leurs champs et arrêtent toute activité interdite dans les aires protégées.
« Les CRR créent des opportunités pour les agriculteurs d’expérimenter avec les nouvelles techniques agrosylvopastorales, d’échanger leurs expériences et de recevoir des conseils techniques et services qui sont adaptés à leurs besoins. L’accent est mis sur l’accès aux connaissances, l’apprentissage interactif et la création de réseaux entre paysans eux-mêmes et entre agriculteurs et autres acteurs ruraux. » explique A. Degrande. Dans cette perspective, l’approche Centres de Ressources Ruraux (CRR) est utilisée pour l’adaptation et la diffusion d’un paquet de pratiques et techniques de gestion de la fertilité des sols, de conservation des eaux et des sols, de culture des arbres, de l’agriculture intelligente face au climat, la gestion des ressources agropastorales, la cogestion des aires protégées, et l’entreprenariat rural. Tout ceci pour donner aux populations les aptitudes pour favoriser la gestion harmonieuse et durable des espaces.
En savoir plus...