COP 28 : « la justice climatique passe par la justice linguistique ! », affirme l’OIF

Les pays francophones d’Afrique sont victimes d’une double injustice au sein des instances de négociation climatique. D’une part, ils se trouvent sur le continent le plus vulnérable au changement climatique, qui contribue pourtant le plus faiblement aux émissions mondiales de gaz à effet de serre (moins de 4%) ; d’autre part, ces pays, essentiellement situés dans la région du Sahel, sont confrontés à une barrière linguistique dans leurs processus nationaux de mobilisation de la finance climatique. En effet, la langue française joue en leur défaveur au sein de ces instances largement dominées par la langue anglaise.

 

Ce constat fait partie des conclusions partagées lors d’une concertation ministérielle francophone de haut niveau sur les enjeux de mobilisation des financements climatiques, organisée par l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) le 9 décembre 2023, en marge de la 28e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP 28).

 

Placée sous le thème de « la langue française au service de l’accès accru à la finance climat », cette concertation a permis aux ministres et chefs des délégations d’identifier les solutions pour une place plus importante de la langue française dans les négociations sur le climat et dans les efforts des pays en développement francophones en matière d’accès à la finance climatique.

 

Les participants à cette concertation de haut niveau de la Francophonie à Dubaï ont formulé plusieurs recommandations.

 

« La justice climatique passe par la justice linguistique, a plaidé Caroline Saint-Hilaire, l'administratrice de l’OIF. Il faut un message fort à l’endroit de nos chefs d’État, mais aussi de nos ministres et représentants, pour qu’ils s’expriment en français et non plus en anglais dans les différentes instances de négociation climatique. »

 

Les différents intervenants ont insisté aussi sur la nécessité d’une francophonie stratégique. Il s’agit ici d’apprendre les uns des autres et de faire jouer la solidarité entre les États francophones qui réussissent dans la mobilisation des financements et ceux qui n’y arrivent pas. Cette solidarité doit aussi s’étendre aux porteurs de projets verts, en essayant d’atteindre un taux d’accès acceptable à la finance climatique pour les pays francophones.

 

Les participants ont également partagé la proposition d’initier et de renforcer un plaidoyer de haut niveau des chefs d’État francophones pour un accès facilité à la finance climatique, avec en perspective le prochain Sommet de Paris sur la finance climatique des pays en développement.

 

Arona Soumare, le point focal de CCNUCC pour la Banque africaine de développement, a souligné que, sur les dix pays les plus vulnérables au changement climatique dans le monde, neuf se trouvent en Afrique sub-saharienne, dont cinq sont francophones. D’où la nécessité de combler le fossé linguistique pour leur permettre d’accéder à plus de ressources.  « La plupart des fonds climatiques nécessitent des processus de candidature longs et complexes, disponibles uniquement en anglais. Cela pose des problèmes aux pays aux capacités limitées, en particulier les pays francophones d’Afrique les moins développés. Il est donc important de faire des plaidoyers pour que les pays francophones puissent soumettre des projets dans leur langue à tous les guichets financiers d’institutions telles que le Fonds vert pour le climat », a souligné M. Soumare. Il a fait également référence au Guichet d’action climatique, lancé avec succès le 4 décembre 2023 lors de la COP 28. Ce guichet vise à accélérer les actions d’adaptation au profit des 37 pays les moins développés d’Afrique, dont 18 sont des pays francophones.

 

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