Réunis à Abidjan, la capitale économique ivoirienne, des ambassadeurs suisses ont invité une équipe de hauts responsables du Groupe de la Banque africaine de développement à un échange de vues sur le développement et la coopération.
La rencontre s’est déroulée vendredi 20 janvier 2023, dans le cadre d’un déjeuner de travail qu’ils organisaient et qui avait pour hôte la secrétaire d’État adjointe suisse pour l’Afrique subsaharienne, Siri Walt. Siri Walt dirige la division Afrique du Département fédéral des affaires étrangères suisse.
Kevin Urama, économiste en chef par intérim du Groupe de la Banque africaine de développement, Daniel Schroth, directeur pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, et Joseph Ribeiro, directeur général adjoint pour la région Afrique de l’ouest étaient accompagnés de Laura Rutishauser, conseillère principale de l’administrateur pour l’Allemagne, le Luxembourg, le Portugal et la Suisse.
L’équipe de la Banque a rencontré les ambassadeurs suisses en poste dans la sous-région ouest-africaine, pour une discussion animée autour de questions d’actualité touchant l’Afrique en général, et la région en particulier.
À la question de savoir si la croissance démographique de l’Afrique était un dividende ou un défi, Kevin Urama a vite répondu : « Le fait qu’il s’agisse d’un défi ou d’un dividende dépend du pays. Les économies africaines sont aujourd’hui à forte intensité de main-d’œuvre, en raison du faible niveau d’apports technologiques », a-t-il noté.
« La jeunesse est donc un formidable atout pour stimuler la productivité économique dans les secteurs clés. Mais, quand ils sont exclus des secteurs productifs clés, ils se voient privés de leurs droits et s’insurgent », a-t-il indiqué. Il a ajouté : « Les jeunes Africains sont férus d’innovation et peuvent stimuler la productivité et la croissance dans les pays ; mais quand il n’y a pas de capital pour financer leurs innovations, ils se sentent abandonnés et deviennent moins productifs. Inclure les jeunes dans des secteurs clés comme l’agriculture, l’énergie et la gouvernance pourrait aider les pays à tirer profit de leur dividende démographique. »
Poursuivant son propos, M. Urama a expliqué : « Nous devons penser à la planification […] pour que la croissance démographique corresponde aux taux de croissance économique. Si le taux de croissance démographique est supérieur au taux de croissance du PIB, la pauvreté s’aggrave. »
- Urama est également vice-président par intérim de la Banque, chargé de la Gouvernance économique et de la Gestion du savoir.
- Ribeiro a déclaré que certains des projets les plus réussis menés par la Banque africaine de développement en Afrique de l’Ouest et sur l’ensemble du continent sont ceux qui donnent la priorité aux femmes et à l’agriculture. Il a indiqué que la Banque avait alloué 178 millions de dollars pour renforcer la résilience alimentaire et lutter contre la malnutrition dans le cadre de la phase 2 du programme P2RS (Programme de renforcement de la résilience à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle au Sahel).
La sécurité est l’un des principaux défis à relever, a déclaré M. Ribeiro. Sur le plan institutionnel, la sous-région compte aujourd’hui trois gouvernements qui, de facto, sont arrivés au pouvoir à la faveur d’un coup d’État militaire : le Mali, le Burkina Faso et la Guinée. Il a indiqué que la Banque y a repris ses programmes depuis la fin juillet 2022.
« Si vous faites votre travail pour les populations, ce sont les mêmes personnes qui reçoivent l’aide nécessaire, au-delà des événements politiques », a-t-il expliqué. Il a souligné que la Banque prenait toutes les mesures requises pour assurer une responsabilité fiduciaire efficace sur la mise en œuvre des projets.
L’Afrique n’est pas en passe d’atteindre l’objectif de développement durable numéro 7 des Nations unies relatif à l’accès universel à l’énergie, a dit M. Schroth. Il a indiqué qu’à la suite de la Covid-19, le nombre de personnes dépourvu d’accès à l’énergie avait augmenté, pour la première fois au cours de ces dernières années. Il a ajouté que le manque d’accès à l’énergie sur le continent ralentit la réalisation des autres objectifs de développement.
« Compte tenu du rôle crucial de l’énergie pour le développement en général, la Banque africaine de développement a placé l’énergie en tête de ses priorités pour le continent », a déclaré M. Schroth.
Il a également évoqué l’une des initiatives clés de la Banque, « Desert to Power », qui couvre les 11 pays du Sahel : « Nous travaillons avec les gouvernements de ces pays sur des feuilles de route et une première série de projets prioritaires pour exploiter le potentiel solaire de la région, mais il faut d’importants capitaux pour réaliser les objectifs de l’initiative. »
Anne Lugon-Moulin, ambassadrice suisse auprès de la Côte d’Ivoire, du Burkina Faso, de la Guinée, du Libéria et de la Sierra Leone, a souligné les relations positives que la Suisse entretient avec la Banque africaine de développement, première institution de développement du continent.
La Suisse est membre de la Banque africaine de développement depuis septembre 1982. Elle est actionnaire du Fonds africain de développement, le guichet de prêts concessionnels pour les pays à faible revenu du groupe, depuis 1973. La Suisse est le 11e plus gros actionnaire du Fonds africain de développement et ses contributions cumulées s’élèvent à plus de 2 milliards de francs suisses à ce jour.
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