Contribution des Initiatives Pilotes de la Commission des forêts d’Afrique centrale (COMIFAC) en matière de gestion durable des Aires Protégées d’Afrique Centrale

La 15ième édition du Congrès Forestier Mondial (CFM) s’est tenue à Seoul en Corée du Sud du 02 au 06 mai 2022. Cette Conférence on ne peut plus influente du secteur forestier mondial, sert de plateforme internationale d’échanges entre les représentations étatiques, les organisations de la société civile et les partenaires au développement. Elle constitue aussi le cadre de formulation des recommandations et déclarations sur les principales questions forestières : gestion durable, désertification, conservation de la biodiversité, etc. Elle revêt de ce fait un caractère des plus stratégiques pour le Bassin du Congo qui, en tant que second poumon vert de la planète, a également de nombreux arguments à faire valoir.

Exposition de la médecine traditionnelle

C’est ainsi qu’à cette occasion, le Projet régional GIZ d’Appui à la COMIFAC a présenté, au cours d’une conférence tenue dans le Pavillon COMIFAC – CEEAC[1], les résultats de deux des cinq initiatives pilotes (IP) de la COMIFAC développées pour produire des impacts aux niveaux local, national et sous-régional dans le cadre de la conservation et de l’utilisation durable de ressources forestières. Cette approche d’initiatives pilotes avait été retenue par la COMIFAC, par souci d’approfondir la réflexion et d’aboutir à des propositions d’harmonisation des politiques sur des thématiques émergentes qui sont peu ou pas abordées dans certains Etats membres. Les initiatives pilotes retenues tirent leurs sources du Plan de Convergence de la COMIFAC, du cadre stratégique 2018-2025 du Réseau des Populations Autochtones et Locales - REPALEAC et du Protocole de Nagoya sur l'accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation (APA).  Les deux initiatives pilotes présentées à Seoul concernent : i) la contribution des connaissances traditionnelles à la conservation de la biodiversité en Afrique Centrale, cas du Tri-national de la Sangha (TNS) et du complexe binational Boumba Ndjida – Sena Oura (BSB Yamoussa) et ii) le Consentement Libre Informé et Préalable (CLIP) : importance d’une implication efficace des Peuples Autochtones et Communautés Locales.

 

  1. NNLa contribution des connaissances traditionnelles à la conservation de la biodiversité en Afrique Centrale : cas du Tri-national de la Sangha (TNS) et du BSB Yamoussa

Nasse traditionnelle pour la pêche

L’initiative pilote intitulée « Appui à l’utilisation des connaissances, innovations et pratiques locales et autochtones déjà identifiées dans la gestion des aires protégées », a été mise en œuvre en collaboration étroite avec le Réseau des Populations Autochtones et Locales pour la Gestion des Ecosystèmes Forestiers d'Afrique Centrale (REPALEAC). Elle a été menée selon une approche méthodologique séquencée en deux temps. D’une part la collecte des données sur les savoirs traditionnels auprès des populations autochtones et communautés locales (PACL) répertoriées au sein des complexes d’aires protégées du BSB Yamoussa (Cameroun, Tchad) et du Tri-national de la Sangha – TNS (Cameroun, République Centrafricaine et République du Congo). D’autre part, la tenue de plusieurs ateliers d’échelle locale et sous-régionale consacrés à la facilitation des échanges entre les différents acteurs et parties prenantes et au renforcement de leurs capacités à l’exemple du concept novateur « Vacances utiles pour la biodiversité » organisé autour du complexe BSB Yamoussa et ayant contribué à la valorisation des savoirs traditionnels entre adultes et jeunes.

 

Cette initiative pilote a manifestement contribué à la valorisation et à la mise en exergue des connaissances traditionnelles des PACL, permettant ainsi de garantir leur pérennité générationnelle. Bien que certaines de ces connaissances soient utilisées quotidiennement par les gestionnaires des aires protégées ou par des chercheurs (p.ex. pistage et autres signes des animaux lors des inventaires fauniques), leur valorisation reste généralement peu reconnue auprès de leurs détenteurs. De surcroît, il est à considérer la perte progressive des rituels de transmission de ces connaissances traditionnelles au sein des jeunes générations. C’est pourquoi il s’avère primordial, pour le maintien de ces rituels auprès de structures traditionnelles, d’accompagner la prise en compte de leurs contributions à la conservation des écosystèmes forestiers d’Afrique Centrale.

 

Seulement, l’utilisation de ces connaissances nécessite le respect des prescriptions relatives à la propriété intellectuelle telles que définies par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) et l’Organisation Africaine de la propriété intellectuelle (OAPI). En effet, toute démarche de collecte puis de promotion/valorisation des connaissances traditionnelles des PACL implique leur Consentement Libre, Informé et Préalable (CLIP) tel que défini par la convention 169 de l’OIT et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Le CLIP s’est donc révélé être le préalable de notre démarche tout au long de cette initiative.

 

2- Le Consentement Libre Informé et Préalable (CLIP) : l’importance d’une implication efficace des Peuples Autochtones et Communautés Locales

 

L’approche CLIP, principe fondamental pris en compte dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples Autochtones (2007), est la capacité des Peuples Autochtones et Communautés Locales (PACL) à donner ou refuser leur consentement librement (sans intimidation ou manipulation) à tout projet de développement qui est appelé à avoir des impacts sur leur mode de vie et sur leur bien-être. Dans l’optique de contribuer à l’application systématique du CLIP dans tous les processus relatifs à la gestion des aires protégées par ses Etats membres, la COMIFAC, en collaboration avec le REPALEAC a mis en œuvre l’IP :« Appui à l’élaboration d’une démarche consensuelle en matière de Consentement Libre, Informé et Préalable (CLIP) dans les aires protégées de l’espace COMIFAC sur la base des expériences existantes : Cas du TNS et de BSB Yamoussa ».

 

Une méthodologie participative et échelonnée a été privilégiée pour sa mise en œuvre dans le TNS. A cet effet, plusieurs ateliers locaux et sous-régionaux ont été organisés, permettant ainsi de réunir dans un même cadre les différents acteurs du TNS pour le renforcement de leurs capacités en matière de CLIP et de droits humains. C’est ainsi qu’en collaboration avec le segment camerounais du TNS, la COMIFAC, le REPALEAC et le Projet régional GIZ d’appui à la COMIFAC, il a été procédé à l’expérimentation d’une approche CLIP dans le cadre du processus de révision du plan d’aménagement du Parc National de Lobeke.  Ce renforcement des capacités à l’objectif double a permis notamment : (1) la mise à disposition des informations sur le CLIP et les préoccupations des populations riveraines au service de la conservation ; (2) l’information des populations sur le CLIP, le processus de révision du plan d’aménagement et l’importance de la participation de ces populations.

 

Le constat a été fait qu’un manque d’informations et de communication mène facilement à des confusions et des malentendus entre les parties prenantes de la gestion durable des aires protégées. Fournir des informations pertinentes et renforcer les capacités de tous les acteurs impliqués est essentiel. Bien que la mise en œuvre de l’approche CLIP nécessite qu’on lui consacre du temps, elle reste l’un des moyens les plus efficaces pour l’implication et la participation inclusive des PACL dans la gestion durable des aires protégées et de leurs zones périphériques.

 

A l’issue du processus de mise en œuvre des IP, sont dérivés des produits tels que des guides (Guide sous-régional sur le CLIP et des catalogues (Catalogue des connaissances traditionnelles) à portée nationale et sous-régionale. Ils proviennent de la capitalisation des expériences et des apprentissages de terrain, et sont voués à être reconduits dans d’autres sites de l’espace COMIFAC.

[1] Commission Economique des Etats d‘Afrique centrale

 

Projet Regional GIZ d'Appui à la COMIFAC

 

Pour d'amples informations, bien vouloir télécharger les presentations ci-dessous:

 

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