CIFOR Publication - Restauration des paysages forestiers et régimes fonciers au Cameroun : Acquis et handicaps

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Awono et al. 2023 Tenure and forest landscape restoration in Cameroon Occasional paper.pdf (4.5 Mo)

 

À l’instar des autres pays du bassin du Congo, le Cameroun est affecté par le phénomène de la déforestation et de la dégradation continue de son couvert forestier, et corrélativement de ses sols. Pour ralentir lesdits phénomènes à la fois anthropiques et naturels, le pays s’est engagé dans un processus ambitieux de restauration des paysages forestiers (RPF), par le truchement des initiatives du Défi de Bonn, de l’AFR100 et de la Grande Muraille Verte (GMV). Ceci s’est concrétisé au niveau domestique par l’adoption d’une Stratégie nationale, suivie de diverses actions de terrain rentrant dans le processus RPF.

 

Une part importante des terres dégradées étant incluse dans les terroirs villageois et leurs exploitations agricoles, la RPF doit s’intéresser aux enjeux de droits coutumiers et de gestion foncière. Le Projet « Restauration des paysages forestiers pour de meilleurs moyens de subsistance : sécuriser la tenure pour catalyser l’action communautaire à Madagascar et au Cameroun (BMZ-FLR) », réalisé par le CIFOR et ses partenaires, s’intéresse donc au processus national de RPF, afin de mettre en lumière ses acquis et ses faiblesses. En outre, c’est l’occasion de se questionner sur la faisabilité ou l’acceptabilité juridique du processus de restauration des paysages forestiers dans le cadre des régimes fonciers et forestiers et des droits coutumiers en vigueur au Cameroun. Pour extraire les principales informations exposées ici, une revue documentaire de la littérature et des législations forestière et foncière a été effectuée.

 

Ainsi, il apparaît de manière évidente que le Cameroun s’est engagé dans la mouvance mondiale de la restauration des paysages forestiers (RPF). Lesdits engagements internationaux se sont traduits par la mise en place d’une Stratégie nationale et par diverses actions de terrain. Cependant, on observe que les dynamiques d’actions en faveur de la RPF en cours au Cameroun sont fragmentées et éparses, et à cela s’ajoutent de nombreux défis techniques, opérationnels, de gouvernance et de disponibilité en ressources financières et matérielles.

 

Quant au rapport qu’entretiennent la RPF et les régimes fonciers en vigueur au Cameroun, il apparaît que les législations foncières et forestières, inspirées de l’héritage colonial, n’offrent pas en l’état actuel des garanties juridiques suffisantes et attractives pour la propriété et la jouissance des arbres plantés ou des forêts réhabilitées aussi bien par les individus, les lignages ou les familles. En effet, l’administration conserve un droit de police technique et de sanctions, y compris dans les forêts des particuliers et autres plantations forestières immatriculées/forêts communautaires.

En conséquence, ce privilège juridique (contrôle/sanction) est susceptible de décourager ou d’étouffer les investissements privés, individuels et collectifs en faveur de la RPF.

En revanche, les régimes fonciers coutumiers apportent des garanties juridiques non écrites et morales à la tenure des arbres plantés ou réhabilités dans des terres et autres espaces qui appartiennent traditionnellement à des individus/familles et lignages, et reconnues comme tels par les autorités traditionnelles légitimes et les sous-ensembles sociaux de la communauté. Mais cet équilibre social coutumier est désormais mis à mal aussi bien par la marginalisation du droit écrit d’inspiration occidentale, que par les mutations sociopolitiques contestataires et pluralistes qui traversent le pays.

 

En tout état de cause, la restauration des paysages forestiers dans un contexte de déforestation et de dégradation forestière accélérées comme au Cameroun exige, au-delà d’une Stratégie nationale, la mise en place de réformes politiques et juridiques des législations foncières et forestières reconnaissant les réalités sociales du pluralisme juridique (cohabitation paisible des droits modernes et coutumiers) pour garantir juridiquement les investissements, ainsi qu’une stratégie de financement claire et durable et des réformes de la gouvernance et autres aspects techniques de la RPF.

 

En plus de ces réformes, il est essentiel que des mesures soient prises pour améliorer la gestion de la tenure foncière au Cameroun sur le terrain, y compris la promotion de la participation et de la consultation des communautés locales dans la prise de décisions sur l’utilisation des terres, et le renforcement des capacités des acteurs impliqués dans la gestion foncière. Si ces mesures sont mises en œuvre de manière efficace, il est possible d’être optimiste quant à la RPF au Cameroun.

 

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