Retour sur les points de débat et réflexion sur le projet de règlement européen sur la déforestation importee – ATIBT

L’ATIBT continue de s’impliquer dans les négociations européennes sur ce règlement, notamment sur les éléments apparaissant comme des sujets de préoccupation, tout en rappelant son soutien global à la proposition de la Commission et à ses objectifs.

 

 

Avec l'adoption d'un nouveau règlement européen sur le bois, le soja, le café, le cacao, la viande bovine et l'huile de palme, les entreprises européennes seront bientôt confrontées à de nouvelles obligations. A ce titre, l’ATIBT a participé à deux évènements qui ont eu lieu en mars dernier :  le webinaire de Preferred by Nature, et l’atelier du CST Forêt organisé par le CIRAD en collaboration avec le Ministère de la Transition Ecologique (MTE). Pour vous permettre de prendre connaissance de ce projet de réglementation, et identifier les risques et opportunités qu’il représente pour la filière bois tropical, nous vous proposons de revenir sur ces deux évènements. L’ATIBT a également écrit une FAQ sur le projet de réglementation, n’hésitez pas à la lire ou la relire.

 

Ce webinaire, qui s’est tenu le 18 mars, a été animé par les spécialistes de l'approvisionnement responsable de Preferred by Nature, Elena Sosa et Chloé Viala qui ont donné un aperçu des éléments clés et des exigences du règlement proposé afin d’aider les entreprises des secteurs concernés à s’y préparer. Alessandra Negri, responsable marchés et RSE de LCB, est également intervenue pour présenter le retour d’expérience de la filière bois en France sur la mise en œuvre de la diligence raisonnée dans le cadre du Règlement Bois de l’UE et sur la certification forestière de gestion durable. Enfin, Laure d'Astorg, de l'Alliance pour la préservation des forêts, a présenté l’outil d’auto-évaluation à disposition des entreprises pour l'évaluation de leur programme d’achats responsables.

 

Bien que des changements puissent être incorporés avant l'adoption de la version finale du texte, Preferred by Nature a souhaité présenter les éléments clés contenus dans la proposition de la Commission Européenne. En effet, l’objectif du règlement et la fondation des mécanismes qui sont proposés resteront probablement inchangés.  PBN a ainsi rappelé que le règlement de l’UE instaurera des obligations sur le marché européen afin de « réduire au minimum la consommation de produits issus de chaînes d’approvisionnement associées à la déforestation ou à la dégradation des forêts – et à accroître la demande et le commerce de produits légaux et « zéro déforestation ». Ce nouveau règlement viendra donc remplacer le Règlement Bois de l’UE (RBUE). Les éléments clés du projet peuvent se résumer en 4 points :

 

  1. Interdiction de l’import et l’export de produits non conformes
  2. Obligation de diligence raisonnée pour les opérateurs
  3. Obligation des Etats membres pour garantir sa mise en œuvre
  4. Mise en œuvre d’un système d’information

 

Vous pouvez voir le replay et les présentations en cliquant ici.

 

Preferred by Nature a également présenté les principales définitions contenues dans le texte de la Commission de l’UE (déforestation, dégradation, opérations de récoltes durables), les produits concernés, les acteurs impliqués. Ces éléments sont eux ouverts à discussion dans le cadre des négociations européennes au Conseil de l’UE car ils peuvent apparaitre comme des sujets de préoccupations d’un point de vue de l’opérationnalité comme de l’efficacité du texte. L’ATIBT est également très vigilante à la bonne coopération avec les pays producteurs pour la construction de ce nouveau règlement.

 

Organisé le 28 mars dans le cadre du CSTF (Comité Scientifique Technique Forêt, organe créé par l’AFD, et en charge d’appuyer la mise en œuvre de la Stratégie nationale sur la déforestation importée (SNDI) française), l’atelier a réuni une trentaine d’acteurs de la société civile identifiés comme clés (représentants de filières, ONG), des experts et chercheurs, des représentants des ministères français concernés (Ministères de la Transition Ecologique, Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation). L’ATIBT était présente pour représenter la filière bois tropical. L’atelier avait pour but de mettre en lumière et débattre des points d’inquiétude soulevés par les ONG, représentants du secteur privé et des délégations françaises, afin d’arriver à une compréhension partagée des enjeux et des pistes de compromis.

 

Cinq points contenus dans la proposition de l’UE ont été débattus :

 

  1. Définitions de forêts, déforestation et de dégradation forestière
  2. « cut off date » de la déforestation au 31 décembre 2021
  3. Intégration d’autres écosystèmes que les forêts
  4. Classement par pays à risque
  5. Opérabilité de la traçabilité

 

Vous pouvez prendre connaissance du compte rendu complet de l’atelier en cliquant ici.

 

Parmi l’ensemble de ses recommandations, l’ATIBT a soutenu l’idée de reprendre la définition contenue dans l’annexe 1 de l’acte délégué sur la taxonomie de l’UE : « forêt désigne une terre correspondant à la définition de la forêt telle qu'elle est énoncée dans la législation nationale ou, lorsqu'elle n'est pas disponible, est conforme à la définition de la forêt de la FAO ». En effet, cette définition permet d’harmoniser les réglementations de l’UE et permet d’éviter l’écueil d’imposer une définition universelle de la forêt sans prendre en compte la diversité des forêts. Pour rendre la définition de la dégradation des forêts claire et adapté à la filière bois, l’ATIBT a soutenu l’idée de lier la définition de la dégradation au concept de gestion durable des forêts.

 

L’ATIBT s’est également exprimé sur les limites du classement par pays à risque (Benchmarking) et la nécessité de conduire ces évaluations du risque aux échelles sous-nationales, ou au niveau opérateur pour prendre en compte les bonnes pratiques individuelles (type certification gestion durable).

 

Concernant la traçabilité, l’ATIBT rappelle l’expérience acquise par la filière bois au travers de la mise en œuvre des chaines de contrôle de certification, et abonde sur l’importance d’une traçabilité robuste et efficace. Elle a soulevé cependant que la transformation du bois peut combiner de très nombreuses sources de ces produits. Une piste de solution pragmatique serait de réaliser une traçabilité à partir de la première infrastructure de collecte ou de transformation (triturateur, usine, coopérative…), et une transparence de toutes les parcelles d’approvisionnement de celle-ci, sans pour autant devoir relier un produit mis sur le marché européen à une parcelle précise.

 

Au travers de ses interventions, l’ATIBT a largement mis en lumière l’intérêt de la certification forestière pour répondre aux enjeux de traçabilité et de durabilité de la gestion forestière, et plaide pour une reconnaissance sans équivoque de ce processus comme outil fiable d’analyse et de réduction du risque dans le futur règlement UE.

 

En complément de cet article, l’ATIBT co-publie avec E. Groutel (Wale) un manifeste pour rappeler l’engagement historique de la filière forêt-bois tropical dans la gestion durable et la traçabilité des bois au travers de la certification et son expérience de la diligence raisonnée grâce à l’application du RBUE (processus FLEGT).

 

L’ATIBT continuera à partager sa position et faire des propositions d’amendements au texte afin de s’assurer que l’objectif du futur règlement soit respecté :  « réduire la consommation de produits provenant de chaînes d'approvisionnement associées à la déforestation ou à la dégradation des forêts, et à augmenter la demande et le commerce de produits légaux et "sans déforestation" dans l'UE. ».

 

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